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Peu de philosophes ont su aller aussi loin que Gilbert Simondon (1924-1989) pour penser de façon radicalement philosophique et constructive la complexité de la relation tendue entre l'humanité et la technique, c'est pourquoi la pertinence de cet auteur paraît évidente à qui souhaiterait problématiser la nature et les nombreuses conséquences de l'inflation du « numérique » dans notre société. Pourtant, l'indéniable richesse des concepts technologiques de ce philosophe semble, à quelques rares exceptions près, ignorer les ordinateurs et l'informatique ; en première analyse elle paraît dépassée, insuffisante voire hors sujet pour penser les récents développements du « numérique ». Face à ce constat, la présente recherche fait l'hypothèse qu'il est possible de penser notre actualité « informatique » avec Simondon à condition de ne pas limiter ce problème aux questions purement technologiques et de considérer plutôt la totalité du corpus. Ainsi est-il montré que le thème de la technique, tel que le traite Simondon, trouve sa valeur et sa signification philosophique parce qu'il répond d'abord et essentiellement à une problématique plus profonde sur le pouvoir régulateur de la culture et des symboles. On comprend par là pourquoi les réalités techniques ne peuvent jamais simplement désigner une réalité qui bouleverserait ou compromettrait une authentique réalisation de la culture : ce que nous qualifions de technologique - par exemple le « numérique » - apparaît alors comme une réalité à la fois fonctionnelle et culturelle, à la fois technique et symbolique. S'en dégage une notion originale de réalité culturelle entendue, dans le sillage de Leibniz, Kant et Cassirer, comme un symbolisme technologique.

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